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Le cri de la salade

A la demande de mes ami(e)s, je me lance à partager quelques variations épistolaires.

Un homme seul - partie 2

Je me dirige vers la sortie en boutonnant mon épais manteau, le froid de l'hiver s'impatiente de me voir le rejoindre. Un employé du restaurant me dépasse vivement et m'ouvre la porte sur la nuit, tout en m'adressant un sourire automatique. Je le remercie chaleureusement et franchis le seuil. Oui le froid de l'hiver est bien là, cette fois. Je frissonne et remonte mon écharpe sur mon nez. Quelques voitures roulent à vive allure sur la nationale à proximité, le bruit de leur moteur est puissant dans le silence qui suit le brouhaha du restaurant. Ma voiture n'est pas difficile à retrouver, dans l'immensité du parking partiellement vidé. Je mets la clef dans la serrure et je découvre que tout à ma joie de venir à cette soirée, j'ai juste omis de fermer la portière. Fort heureusement pour moi, personne n'a eu l'idée de vérifier et rien ne manque à mon bazar non organisé qui traîne dans la boite à gants ou sur le tableau de bord. Je m'installe derrière le volant et fais tourner la clef sur le contact après les quelques secondes de préchauffage réglementaire. C'est toujours ce moment que je n'aime pas, m'asseoir sur un siège froid et démarrer le moteur tout en espérant qu'il va réchauffer rapidement l'habitacle. Ah ! Si j'avais des sièges chauffants, ce serait bien agréable à mon fessier ! Mais non, je me contente de ma vieille voiture, fidèle au poste bien que son état se dégrade d'année en année. J'ai déjà envisagé à de nombreuses reprises de changer de véhicule, mais je me dis que tant que celui-ci résiste, autant continuer. Sait-on de quoi l'avenir sera fait ? Pourtant, à chaque nouvelle réparation, je me questionne sur le bien-fondé de cette démarche d'entretien d'un vieux véhicule, mais je ne fais rien pour changer les choses. Je me demande si finalement, ce ne serait pas tout bonnement un attachement irraisonné à ce vieux tacot fidèle...

Je n'attends pas que la voiture se réchauffe, en roulant, cela ira plus vite, aussi, j'enlève le frein à main et j'enclenche la première. Je démarre doucement, je me souviens que le parking est truffé de nids de poules, je me suis fait avoir à l'arrivée, pas deux fois dans la même soirée. Je m'insère facilement sur la nationale étant donné la faible circulation qui s'y trouve.

J'ai allumé la radio afin de profiter encore un peu d'une ambiance musicale. À cette heure je vais être tranquille, il n'y a quasi jamais de pub et point trop d'animateurs bavards. La mélodie se diffuse doucement autour de moi, je monte le son afin d'en profiter plus intensément. Je reconnais très vite une chanson mélancolique de Michel Jonasz et, bien que sans sa permission, je l'accompagne de mon interprétation toute personnelle. Je ne démérite pas pour autant, en tout cas c'est mon avis amusé.

La nuit est sombre, les étoiles sont cachées par les nuages qui nous ont accompagnés toute la journée laissant échapper quelques averses fraîches. Mais il ne pleut plus, un répit de courte durée ? En tout cas, cela me permet de rentrer sans mettre les balais d'essuie-glaces en marche.

Tiens oui, les essuie-glaces ! J'ai encore récolté une publicité. Je ne l'ai pas remarquée en montant dans mon véhicule, mais maintenant je la vois. Mon attention est détournée de la route, provisoirement. Cela ne semble pas être une publicité traditionnelle, je suis curieuse. Une embardée me ramène à la réalité. Au lieu de chercher à comprendre ce qui est coincé sur mon pare-brise, je ferais mieux de m'attacher à regarder le ruban lumineux que mes feux de croisement tracent sur la chaussée. Je rencontre encore quelques voitures, mais il y a surtout cette camionnette qui me talonne avec ses phares mal réglés qui m'éblouissent. Je m'agace en vain et change la position de mon rétroviseur intérieur puis pose ma main gauche sur le reflet renvoyé par mon rétroviseur extérieur. C'est tout ce que j'ai trouvé pour éviter cette agression visuelle en pleine nuit. Fort heureusement, le chauffeur de la camionnette est du genre pressé et il ne patiente pas longtemps derrière moi. Dès qu'il le peut, il me double vivement et se rabat tout aussi vivement devant moi. C'est une de ces fameuses camionnettes blanches qui stationnent aux entrées de bois ou sur des petits chemins, près des routes très fréquentées. Une journée qui commence ou qui s'achève dans la nuit froide pour la personne dont c'est le gagne pain. Très vite le conducteur met de la distance entre nous et bientôt, il disparaît à ma vue. Voilà que je suis de nouveau tranquille dans mon trajet nocturne.

Ma radio s'éveille avec une chanson rythmée de Meghan Trainor et me voici qui m'agite en même temps que je chante avec elle dans un anglais francisé, les mains décollant du volant pour suivre le mouvement des notes joyeuses

Je roule encore un moment tranquillement quand j'arrive enfin devant chez moi. Il était temps, la fatigue d'une journée bien chargée sonnait le rappel auprès de mes yeux qui ne semblaient plus vouloir m'obéir. Je m'imaginais déjà obligée de m'arrêter afin de piquer un petit roupillon sur le bas côté plutôt que de me prendre un arbre ou un fossé.

Je sors de la voiture afin d'ouvrir la grille de la résidence, remonte dans le véhicule et avance jusqu'à dépasser la grille, puis je remets ça, sortir de la voiture, refermer la grille, remonter et repartir jusqu'au garage déclenchant le bip qui conditionne l'ouverture de la porte. Je remercie à chaque fois la copropriété d'avoir installé un système automatique depuis quelques semaines, c'est tellement plus agréable que les allées et venues pour la grille. Il ne me reste plus qu'à espérer qu'ils finissent par installer l'automatisme sur l'entrée extérieure.

Fatiguée, je ressers mon écharpe et reboutonne mon manteau pour faire face au froid qui va m'agresser dès que je vais sortir de ma voiture pour me rendre à la porte de mon appartement, je le sais. Il est sournois et bien que l'on soit préparé à sa morsure, c'est toujours très désagréable d'y être confronté. Je referme ma portière et me dirige à pas rapides vers mon chez moi tout en cherchant la bonne clef pour l'ouvrir. La lumière s'allume automatiquement à mon approche, ça aussi c'est une installation très utile.

Ouf, ça y est, je suis dans ma demeure, mon petit palace, au chaud. J'accroche mon manteau sur la patère, pour autant, je tarde un peu à enlever mon écharpe qui me garde encore dans cette douce torpeur du moment où la température est devenue un brin trop chaude, dans la voiture. Mais finalement, je me résous à la déposer avec le manteau, pour le prochain usage, probablement demain matin, enfin, ce matin, vu que la nuit est déjà bien avancée.

Il n'est plus temps de se distraire par diverses manières, je m'en vais à la salle de bain afin d'y brosser mes dents et nettoyer un visage que j'avais partiellement maquillé à l'occasion de ce dîner d'anniversaire. Je baille largement, je crois que ma tête au réveil sera pour tous l'indication d'une soirée animée.

Je me traîne jusqu'à mon lit, ma couette me tend les bras et m'invite à profiter enfin de sa douceur et de son confort. Je n'hésite pas une seconde de plus et c'est avec un sourire enfantin que je plonge dans un délice de félicité. Qui peut prétendre qu'il y a un meilleur moment dans la journée que celui où l'on se couche enfin pour profiter d'un sommeil bienfaisant et réparateur ?

Je cherche ma place en détendant mes jambes et je m'étale tel un bouton de rose qui s'épanouit, en grande habituée que je suis pour occuper cet espace. Puis mon cerveau commence son cheminement vers le repos, repassant sa journée en mode accéléré pour en tirer le bilan qui s'impose. Et c'est là que je réalise que je n'ai pas pensé à ramasser cette étrange publicité coincée entre mon essuie-glace et mon pare-brise. Qu'à cela ne tienne, cela attendra bien demain, je ne vais pas me lever pour un bout de papier. Pendant que je pense à ma journée, je perds petit à petit le fil et, sans m'en rendre compte, je m'endors tranquillement.

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